Lectures du mercredi de la 3e semaine de l’Avent, commentées.
Dôme sud du narthex intérieur à l’église Saint-Sauveur-in-Chora, à Istanbul, mosaïque représentant les ancêtres du Christ à partir d’Adam.
Photo de José Luiz Bernardes Ribeiro, licence Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported
Première lecture
« Le sceptre royal n’échappera pas à Juda »
Lecture du livre de la Genèse (49, 1-2.8-10).
En ces jours-là,
Jacob appela ses fils et dit :
« Assemblez-vous ! Je veux vous dévoiler
ce qui vous arrivera dans les temps à venir.
Rassemblez-vous, écoutez, fils de Jacob,
écoutez Israël, votre père.
Juda, à toi, tes frères rendront hommage,
ta main fera plier la nuque de tes ennemis
et les fils de ton père se prosterneront devant toi.
Juda est un jeune lion.
Tu remontes du carnage, mon fils.
Il s’est accroupi, il s’est couché comme un lion ;
ce fauve, qui le fera lever ?
Le sceptre royal n’échappera pas à Juda,
ni le bâton de commandement, à sa descendance,
jusqu’à ce que vienne celui à qui le pouvoir appartient,
à qui les peuples obéiront. »
Psaume
Psaume 71 (72), 1-2, 3-4, 7-8, 17
R/ En ces jours-là fleurira la justice,
grande paix jusqu’à la fin des temps. (cf. Ps 71, 7)
1 Dieu, donne au roi tes pouvoirs,
à ce fils de roi ta justice.
2 Qu’il gouverne ton peuple avec justice,
qu’il fasse droit aux malheureux !
3 Montagnes, portez au peuple la paix,
collines, portez-lui la justice !
4 Qu’il fasse droit aux malheureux de son peuple,
qu’il sauve les pauvres gens, qu’il écrase l’oppresseur !
7 En ces jours-là, fleurira la justice,
grande paix jusqu’à la fin des lunes !
8 Qu’il domine de la mer à la mer,
et du Fleuve jusqu’au bout de la terre !
17 Que son nom dure toujours ;
sous le soleil, que subsiste son nom !
En lui, que soient bénies toutes les familles de la terre ;
que tous les pays le disent bienheureux !
PSAUME 71 (72), 1-2.7-8.12-13.17
1 Dieu donne au roi tes pouvoirs,
à ce fils de roi ta justice.
2 Qu’il gouverne ton peuple avec justice,
qu’il fasse droit aux malheureux !
7 En ces jours-là, fleurira la justice,
grande paix jusqu’à la fin des lunes !
8 Qu’il domine de la mer à la mer,
et du Fleuve jusqu’au bout de la terre !
12 Il délivrera le pauvre qui appelle
et le malheureux sans recours
13 Il aura souci du faible et du pauvre,
du pauvre dont il sauve la vie.
17 Que son nom dure toujours ;
sous le soleil, que subsiste son nom !
En lui, que soient bénies toutes les familles de la terre ;
que tous les pays le disent bienheureux !
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DANS L’ATTENTE DU MESSIE PROMIS
« Dieu donne au roi tes pouvoirs » : c’est une prière … « Qu’il gouverne ton peuple avec justice », c’est un souhait. Ce sont les mots mêmes que l’on disait lors du sacre d’un nouveau roi… Nous sommes au temple de Jérusalem… mais curieusement, ce psaume a été composé et chanté après l’Exil à Babylone, (donc entre 500 et 100 av. J.-C.) c’est-à-dire à une époque où il n’y avait déjà plus de roi en Israël ; ce qui veut dire que cette prière, ce souhait ne concernent pas un roi en chair et en os… ils concernent le roi qu’on attend, que Dieu a promis, le roi-messie. Et puisqu’il s’agit d’une promesse de Dieu, on est sûr qu’elle se réalisera.
La Bible tout entière est traversée par cette espérance indestructible : l’histoire humaine a un but, un sens ; et le mot « sens » veut dire deux choses : à la fois « signification » et « direction ». Dieu a un projet. Ce projet inspire toutes les lignes de la Bible, Ancien et Nouveau Testaments : il porte des noms différents selon les auteurs. Par exemple, c’est le « Jour de Dieu » pour les prophètes, le « Règne des cieux » pour saint Matthieu, le « dessein bienveillant » pour saint Paul, mais c’est toujours du même projet qu’il s’agit. Comme un amoureux répète inlassablement des mots d’amour, Dieu propose inlassablement son projet de bonheur à l’humanité. Ce projet sera réalisé par le Messie et c’est ce Messie que les croyants appellent de tous leurs vœux lorsqu’ils chantent ce psaume au temple de Jérusalem.
Son projet de bonheur, Dieu l’avait déjà annoncé dès sa première parole à Abraham, au chapitre 12 de la Genèse, alors que celui-ci ne s’appelait encore que Abram ; Dieu lui avait promis : « En toi seront bénies toutes les familles de la terre. » (Gn 12,3 1). Je crois qu’il est très important de ne jamais oublier que dès le début de la révélation biblique, il est clair que l’humanité tout entière est concernée, même si on ne l’a pas compris tout de suite. Le peuple d’Israël a découvert peu à peu qu’il est élu non pas pour garder son beau secret pour lui tout seul, mais pour annoncer au monde le projet de Dieu.
Notre psaume ne dit pas autre chose : « En lui (sous-entendu le roi-messie) que soient bénies toutes les familles de la terre ; que tous les pays le disent bienheureux ».
Un autre verset que nous avons lu également reprend une autre promesse de Dieu à Abraham, au chapitre 15 de la Genèse cette fois : « Le SEIGNEUR conclut une Alliance avec Abram en ces termes : À ta descendance je donne le pays que voici, depuis le Torrent d’Égypte jusqu’au Grand fleuve, l’Euphrate » (Gn 15,18). Et le psaume répond en écho : « Qu’il domine de la mer à la mer et du Fleuve jusqu’au bout de la terre ! » Plus tard, le livre de Ben Sirac (« l’Ecclésiastique ») rapprochera toutes ces promesses faites à Abraham ; on y lit : « Dieu lui assura par serment que les nations seraient bénies en sa descendance, qu’il le multiplierait autant que la poussière sur la terre, qu’il exalterait ses descendants comme les étoiles ; il leur donnerait un héritage allant de la mer à la mer, et du Fleuve jusqu’à l’extrémité de la terre. » (Si 44,21)
Nous qui sommes assez chatouilleux sur la démocratie, sommes peut-être un peu surpris qu’on puisse tant rêver d’un roi et d’un roi qui domine sur toute la planète « de la mer à la mer et du Fleuve jusqu’à l’extrémité de la terre ! » ; nos empereurs les plus ambitieux n’ont jamais osé rêver jusque-là. Mais il ne faut pas oublier que, dans la Bible, c’est en définitive le peuple qui est au centre de la promesse : le roi n’est qu’un instrument dans la main de Dieu, un instrument au service du peuple. Et ce peuple aura la dimension de l’humanité.
EN CES JOURS-LÀ FLEURIRA LA JUSTICE
Une humanité enfin fraternelle et pacifique où plus personne ne connaîtra l’humiliation : « En ces jours-là fleurira la justice, grande paix jusqu’à la fin des lunes ! » Enfin sera réalisé le rêve de justice et de paix qui hante toute l’humanité depuis les origines : ce n’est pas pour rien que le nom même de « Jérusalem », en hébreu, veut dire « ville de la paix » ; mais Bagdad, aussi veut dire « demeure de la paix », tout autant que Dar-Es-Salam ; parce que tous les peuples en rêvent depuis toujours.
Et c’est la force incroyable, l’audace de la Bible d’affirmer contre vents et marées, et contre toutes les apparences contraires, que le jour de la paix viendra. Et comme justice et paix vont ensemble, « justice et paix s’embrassent » dit même le psaume 84/85, il n’y aura plus de pauvre à la surface de la terre ; alors la terre sera vraiment « sainte » comme elle doit être ; cet idéal-là court lui aussi tout au long de la Bible ; le livre du Deutéronome disait « Il n’y aura pas de pauvre chez toi » (Dt 15,4). Le psaume s’inscrit dans cette ligne : « Il délivrera le pauvre qui appelle et le malheureux sans recours. Il aura souci du faible et du pauvre, du pauvre dont il sauve la vie. »
Tout ce psaume rappelle donc la promesse de Dieu et lui demande de hâter ce jour… non pas que Dieu risque d’oublier ses promesses ! Au contraire, si les pèlerins assemblés au temple de Jérusalem redisent ce psaume sur le roi-messie, c’est parce qu’ils savent que Dieu n’oublie pas son projet. Quand nous prions, il ne s’agit pas de rappeler à Dieu quelque chose qu’il risquerait d’ignorer ou d’oublier… Quand nous prions, nous apprenons à regarder le monde avec les yeux de Dieu ; nous nous replaçons devant le projet de Dieu pour raviver notre espérance et pour trouver la force de travailler à l’accomplissement de la promesse. Car la paix, la justice, le salut des pauvres et des malheureux ne viendront pas par un coup de baguette magique : à nous de prier, de faire nôtre le projet de Dieu, et de nous laisser guider par l’Esprit Saint pour nous engager dans ce combat. Avec sa lumière, avec sa force, avec sa grâce, nous y arriverons.
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Note
1 – À partir du texte hébreu, ce verset (Gn 12,3) peut s’entendre de deux manières, et ces deux manières ne s’excluent pas l’une l’autre, au contraire elles s’additionnent : d’abord « Par toi se béniront toutes les familles de la terre » : c’est-à-dire, quand elles se souhaiteront du bien, toutes les familles de la terre feront référence à toi comme un modèle de réussite ; on dira « puisses-tu réussir comme notre père Abraham » ; deuxième traduction : « À travers toi, Abraham, grâce à toi, toutes les familles de la terre seront bénies, c’est-à-dire connaîtront le bonheur. » (à condition qu’elles veuillent bien entrer dans ce projet, bien sûr).
Évangile
« Jésus, fils de David, fils d’Abraham »
Alléluia, Alléluia.
Viens, sagesse du Très-Haut !
Toi qui régis l’univers avec force et douceur,
enseigne-nous le chemin de vérité.
Alléluia.
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (1, 1-17)
Généalogie de Jésus, Christ,
fils de David, fils d’Abraham.
Abraham engendra Isaac,
Isaac engendra Jacob,
Jacob engendra Juda et ses frères,
Juda, de son union avec Thamar, engendra Pharès et Zara,
Pharès engendra Esrom,
Esrom engendra Aram,
Aram engendra Aminadab,
Aminadab engendra Naassone,
Naassone engendra Salmone,
Salmone, de son union avec Rahab, engendra Booz,
Booz, de son union avec Ruth, engendra Jobed,
Jobed engendra Jessé,
Jessé engendra le roi David.
David, de son union avec la femme d’Ourias, engendra Salomon,
Salomon engendra Roboam,
Roboam engendra Abia,
Abia engendra Asa,
Asa engendra Josaphat,
Josaphat engendra Joram,
Joram engendra Ozias,
Ozias engendra Joatham,
Joatham engendra Acaz,
Acaz engendra Ézékias,
Ézékias engendra Manassé,
Manassé engendra Amone,
Amone engendra Josias,
Josias engendra Jékonias et ses frères
à l’époque de l’exil à Babylone.
Après l’exil à Babylone,
Jékonias engendra Salathiel,
Salathiel engendra Zorobabel,
Zorobabel engendra Abioud,
Abioud engendra Éliakim,
Éliakim engendra Azor,
Azor engendra Sadok,
Sadok engendra Akim,
Akim engendra Élioud,
Élioud engendra Éléazar,
Éléazar engendra Mattane,
Mattane engendra Jacob,
Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie,
de laquelle fut engendré Jésus,
que l’on appelle Christ.
Le nombre total des générations est donc :
depuis Abraham jusqu’à David, quatorze générations ;
depuis David jusqu’à l’exil à Babylone, quatorze générations ;
depuis l’exil à Babylone jusqu’au Christ, quatorze générations.
Fichier audio des lectures du jour, suivies d’un commentaire de 6′ 15 » à 10′ 18 » – Merci à « Évangile et Parole du jour – Cathoglad » !
Méditation du père Gilles (du 17 décembre et non pas du 17 septembre !)
Prédication du Pasteur James Woody sur Mt 1, 1-17 : « La généalogie de Jésus, une genèse de la subversion » (40′ 38″) – Oratoire du Louvre.
Homélie du jour à la basilique Notre-Dame-de-la-Garde à Marseille.
Homélie de la messe du jour à Notre-Dame-du-Laus.
Homélie du jour, à Notre-Dame de Paris.
Homélie de la messe du jour à Lourdes.
Méditation d’Étienne Tarneaud . Je vous invite à vous abonner gratuitement à ses méditations sur WhatsApp (le contacter au 06 20 14 00 33).
Commentaire de Thierry Jallas.
Comme d’habitude, j’essaie de faire le lien entre les Écritures et la DSÉ (Doctrine Sociale de l’Église), notamment le principe personnaliste. Pour rappel, une formulation de celui-ci se trouve à l’article 135 du Compendium (de la DSÉ) :
« L’homme ne peut tendre au bien que dans la liberté que Dieu lui a donnée comme signe sublime de son image. […] La dignité de l’homme exige donc de lui qu’il agisse selon un choix conscient et libre, mû et déterminé par une conviction personnelle et non sous le seul effet de poussées instinctives ou d’une contrainte extérieure. »


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